[TRIBUNE LIBRE] Réflexion sur une prose biliaire francophobe, stupide et inutile

Nous publions ci-après partiellement, cette lettre ouverte de l’un de nos lecteurs après la publication d’une “lettre ouverte à la France” publiée sur les réseaux sociaux et reprise dans un magazine breton, et en écho au dernier article publié par AR GEDOUR .  https://www.argedour.bzh/tribune-libre-reflexion-prose-biliaire-francophobe-stupide-vulgaire-inutile/ Comme vous le savez Ar Gedour ne fait pas dans la politique mais, dans cette rubrique “Point de vue” ouverte à des opinions diverses qui n’engagent pas la rédaction mais leurs auteurs, nous publions cette tribune libre,  lettre ouverte de Yves-Marie Moridur à la lettre ouverte de madame LK, comme une invitation à réfléchir sur les questions sociétales, culturelles et spirituelles évoquées, ainsi que sur la manière de les aborder.

Par votre lettre ouverte, vous entendez tancer la France, mais vous vous posez en moralisatrice, et le langage ordurier que vous avez cru bon d’employer vous retire ce rôle que vous vous êtes octroyée. D’autres que vous, la crème de l’élite bretonne, s’est par le passé employée à rappeler à la France ses devoirs envers la Bretagne, et cette élite  l’a fait avec élégance, avec courtoisie et diplomatie. Elle s’est appuyée sur un argumentaire sérieux, et non dans l’invective gratuite, stupide et stérile.

Votre lettre n’exprime en fin de compte que de la rancœur qu’il conviendrait de laisser de côté si l’on veut avancer. Elle n’exprime qu’une francophobie rancie qui n’a même plus le mérite d’être originale tant elle est devenue un poncif à la mode pour tous les branchés bobos et autres, courant après la dissolution de leur propre pays. Il est de bon ton aujourd’hui pour chaque peuple d’Europe de faire dans la phobie de lui-même, et croyez-moi, le Breton qui n’est jamais en retard d’un vice à la mode fait, sans s’en douter, dans la brittophobie : preuve en est sa propension à épouser toutes les idéologies de mort qui mène, avec les autres pays, la Bretagne au tombeau. L’originalité est qu’elle le fait en chantant sur fond de kan ha diskan, de cornemuses et de fêtes à n’en plus finir …

Dans tous les reproches que vous faites à la France, vous en avez oublié un : son apostasie immanente. Est-ce parce que ce problème ne vous intéresse pas, et n’intéresse guère le milieu breton ?  Car si aujourd’hui la France se comporte en prostituée, comme d’ailleurs toutes les nations d’Europe, y compris la Bretagne, c’est parce que les idéologues et leurs idéologies qui prennent leurs racines dans le siècle dit “des Lumières” l’ont prostituée, et de prostituée, elle est devenue maquerelle, mais ce n’était déjà plus, et ce n’est plus la France, ce n’est plus le pays réel, ce n’est plus la France des terroirs et des clochers, celle des cathédrales et des magnifiques monuments élevés de terre.

Que vous méprisiez la France des politiciens apatrides, apostats, dévots des Grands Ancêtres révolutionnaires, soit ! Moi aussi ! Mais à vous lire, de la France vous faite un paquet unique, et vous vouez le tout au bûcher. Jean-Paul II lui demandait ce qu’elle avait fait des promesses de son baptême. La question vaut aussi pour tous les pays anciennement chrétiens, et vaut pour nous aussi Bretons : qu’avons-nous fait de la promesse de notre baptême en tant que pays, en tant que chrétiens ?

Car voyez-vous, ne vous en déplaise, la Bretagne est aussi née chrétienne. La France et l’Europe, Madame, sont victimes de ceux qui de manière satanique ont perverti et prostitué leur âme, leur foi, leurs  traditions, et jusqu’à leur substrat physique.  Au lieu d’invectiver la France, vous auriez été plus inspirée de la prendre en pitié. Je ne suis pas de ceux qui se réjouissent de sa mort annoncée, en s’imaginant en tirer quelques profits nationalistes.

La mort de la France – je parle du pays réel – me serait autant insupportable que la mort de l’Allemagne ou de l’Espagne, de l’Angleterre ou des Pays-bas, qui sont sans doute déjà mortes mais ne le savent pas encore ; que la mort de la Bretagne, que la mort de chaque patrie qui forme cette Europe devenant de plus en plus un gigantesque terrain vague dans lequel cent peuples différents viennent camper et le défigurer.

C’est parce que ce malheur nous est arrivé que nous sommes, nous Bretons, à même de comprendre le désespoir des Français qui aiment leur patrie

 

Le malheur qui aujourd’hui arrive à la France, le malheur de voir nier son Histoire,  ses grands hommes, sa culture, sa foi, ses traditions, et jusqu’à sa langue qui se dévoie, c’est le malheur qui est arrivé depuis longtemps à la Bretagne. Je vous le concède, la France, du moins une certaine France, a là sa part de responsabilité. Mais justement, c’est parce que ce malheur nous est arrivé que nous sommes, nous Bretons, à même de comprendre le désespoir des Français qui aiment leur patrie. Le comprendre nous honorerait. Nous réjouir des malheurs présents  de la France ne sera, je le répète, d’aucun profit pour la Bretagne.

Voyez-vous, une des plaies d’un certain nationalisme breton, qu’il soit de gauche ou de droite, mais on les retrouve dans beaucoup de mouvements identitaires européens, c’est d’avoir rejeté le christianisme et toute transcendance, pour courir vers les chimères idéologiques, vers un athéisme porté comme un étendard, vers un néo-paganisme et ses panthéons  fantasmés, et cela leur retire tout avenir. Croire que la Bretagne se sauvera du tourbillon suicidaire des nations européennes en appelant les panthéons anciens à la rescousse confine à l’infantilisme politique. Votre lettre ouverte en est la parfaite expression : vous êtes passée à côté de l’essentiel parce qu’il ne vous intéresse pas, comme il n’intéresse pas bien des gens. Il est vrai que la colère, la rancœur, la haine sont de bien vilaines fées qui aveuglent. Malheureusement, force est de constater qu’aujourd’hui, comme hier, les meilleurs initiatives bretonnes sont parasitées par un pseudo-nationalisme qui se veut identitaire, mais qui par ses choix idéologiques, qu’ils soient de gauche ou de droite, détruisent les identités par ce nationalisme bilieux, stérile et sans avenir parce qu’il a rejeté l’essentiel : les racines chrétiennes de l’Europe, et pour ce qui nous concerne plus directement, de la Bretagne.

Si vous voulez, Madame, à l’avenir interpeller la France et ses dirigeants, faites le donc en termes courtois, appuyez-vous sur des argumentaires crédibles, oubliez l’insulte, mais avant tout prenez des leçons chez nos anciens qui, religieux ou laïques savent par une belle plume et une langue, breton ou français, étayer leurs propos.

La Bretagne pourrait encore faire entendre sa voix, mais à la seule condition qu’elle soit portée par une élite, non par des nains – fussent-ils des korrigan – de la pensée et de l’action

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